Dans cet article issu du guide des modes musicaux, nous allons nous intéresser à la gamme mineure naturelle, aussi appelée mode aeolien.
La gamme mineure naturelle en bref
La gamme mineure naturelle sur le Tonnetz en tonalité de La
- Nom :
- mode de la (nom moderne)
- mode aeolien ou éolien (nom courant)
- mode mineur naturel
- mode mineur mélodique descendant (nom du système tonal)
- mode asavari (nom indien)
- mode kitmun (en sumérien)
- ou gamme mineure naturelle, par abus de langage (ouf ! ça en fait des noms… 🙄)
- Échelle : Diatonique
- Intervalles caractéristiques du mode : M2 et m6.
- Nota bene : on dit généralement que la gamme mineure n’a pas d’intervalles caractéristiques puisqu’étant un mode de référence pour l’oreille. Mais ! Il est le seul mode diatonique à posséder à la fois un degré II majeur et un degré VI mineur. Du coup, si on entend ces deux degrés, on est certain d’être dans ce mode.
- M2 le distingue du phrygien et du locrien, m6 le distingue du dorien.
Notez que les modes modernes dont on parle ici n’ont rien à voir avec les modes (tonos) de la Grèce antique. Pour éviter cette confusion commune que j’ai moi-même longtemps eue, il ne faudrait pas appeler les modes diatoniques des “modes grecs”. (Plus de précisions ici, ici et ici)
Harmonisation du mode de La
| 3 sons | 4 sons | Intervalles constituants | Sur le tonnetz |
|---|---|---|---|
| i | -7 |  |
 |
| ii dim | ⌀ [ou m7b5 ] |  |
 |
| ♭III | Δ |  |
 |
| iv | -7 [ou m7, min7] | |
|
| v | -7 | |
|
| ♭VI | Δ [ou M7, maj7] | |
|
| ♭VII | 7 |  |
 |
Astuces et particularités de ce mode
- Avant tout, une gamme en mode aeolien possède une relative en mode ionien. L’exemple basique lorsqu’on explique qu’une gamme mineure naturelle possède une relative majeure, c’est : “Do majeur est la relative de La mineure naturelle”. De ce point de vue, l’accord de tonique de l’aeolien est donc la triade mineure de la sus-dominante du mode ionien (degré VI). Vous suivez toujours ? 😜
- Mais distinguons bien le mode mineur utilisé en musique classique du mode aeolien dont il est issu ! Quand on parle de “mode mineur” on sous-entend “mode mineur harmonique avec ses deux degrés mobiles”.
- Ainsi, ce mode aeolien est la copie conforme du mode mineur mélodique descendant. Avec une approche modale, on parlera de mode aeolien ; tandis qu’avec une approche tonale, on parlera plus volontiers de mode mineur mélodique descendant
- Du coup, en harmonie tonale il se marie évidemment très bien avec les modes mineur harmonique et mineur mélodique ascendant ! Les modes descendant et ascendant étant d’ailleurs exploités mélodiquement pour ne pas surprendre l’oreille en évitant la seconde augmentée (très caractéristique) du mode mineur harmonique.
- En outre dans ce mode aeolien (mineur naturel, donc) l’accord du degré V est mineur, alors qu’il est majeur en mode mineur harmonique. Du coup en modal, l’accord v-7 perd la dissonance tritonique entre sa tierce et sa septième. Le degré V perd donc le caractère d’un accord de septième de dominante (et par la même, sa fonction de dominante). L’enchaînement V–I n’affirme plus aussi clairement la tonalité.
- Attention à la progression bVII7–bIIImaj7 qui pourrait sonner très ionien si elle est mal placée à la fin d’une progression et faire penser à la cadence V7-Imaj7 (typiquement G7–Cmaj7)
- Si on soustrait les deuxième et sixième degrés, on se retrouve avec le mode pentatonique mineur. Ce qui fait qu’on pourrait se servir de ces deux degrés comme des notes de passages pour ses solos en penta.
- Mélodiquement, il y a absence de tension du degré bVII vers le degré I.
- Le triton se situe entre les degrés II et bVI. Pensez y pour vos mélodies.
- Chose intéressante, l’accord du degré II est diminué. Ainsi il est très tendu en tant que triade. Et on le retrouvera donc moins souvent dans les progressions d’accords que les degrés IV et bVI qu’il substitue parfois (dans leur fonction de sous-dominante).
- Avec une approche plus modale que tonale, vous pouvez jouez le mode aeolien sur un accord m7. Exactement comme les modes dorien ou phrygien d’ailleurs. L’utilisation du mode aeolien sera d’autant plus justifié si l’un des accords qui précède ou qui suit l’accord m7 peut aussi faire partie de ce mode.
- Si vous jouez une mélodie aeolienne sur un accord m7, faites attention au degré bVI qui ne devrait être jouée qu’en note de passage. S’attarder dessus sonnera un peu bizarre selon le contexte. Ou du moins, disons un peu out.
Comme pour toute théorie, vous devez essayer et expérimenter ça par vous-même et écouter ce que ça donne. Sinon ça ne sera jamais vraiment parlant… N’oubliez pas que seule votre oreille peut vous dire quand jouer telle ou telle sonorité !
Quelques progressions et cadences associés au mode aeolien
- Vm7 – Im7
- Im7 – Vm7 – IVm7
- Im – VII – VI – VII
- Des variations minorisées des 4 accords magiques
- Im – VI – III – VII
(issue de la progression majeure vi – IV – I – V surnommée “la progression féminine sentimentale”) - Im – Vm – VI – IVm
- VI – IVm – Im – Vm
- Im – VI – III – VII
Couleurs de la gamme mineure naturelle
Catalogué comme étant le mode de la tristesse par excellence, et pour cause : il est omniprésent dans les ballades. Ses absences de tensions (pas d’accord de 7e de dominante ou tout simplement de note sensible) le rendent plutôt doux, calme et tendre.
Comparativement, il est un peu plus sombre que le mode dorien, mais plus lumineux que le mode phrygien.
Les musiciens s’accordent souvent à parler de mélancolie. Disons donc que le mode de la est gentiment mélancolique (d’où son utilisation fréquente chez Santana).
Mais il peut aussi sonner de manière émue ou passionnée, c’est un mode très utilisé dans les ballades, la variété, le raggae, mais aussi le rock, le hard-rock, ou encore la pop. Sur une musique plus dansante, on peut même atteindre un mélange “sucré-salé” comme dans I Kissed a Girl ou Hot N Cold de Katy Perry.
Exemples
- Bob Dylan – All Along the Watchtower
- R.E.M. – Losing My Religion
- Katy Perry – I Kissed a Girl
- Katy Perry – Hot N Cold
- Sum 41 – Pieces
- System Of A Down – Lonely Day
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